La lumière.
C'était devenu une chose abstraite, ici. La faute à ces prisonniers qui arrivaient en masse et clamaient haut et fort que tous les artifices que les gens d'ici pourraient réaliser ne seraient jamais à la hauteur pour éclairer la voute. Les couleurs étaient ternes, les visages aussi. Mais, en aucun cas, cela ne semblait perturber la vie tragique des habitants d'Underland. Et pourquoi s'en préoccuperaient-ils ? Leurs cœurs étaient déjà bien plus sombres que leurs nuits sans lune. Ils n'en avaient cure.
Heureusement, ils n'étaient pas tous perdus dans leurs sombres humeurs. Rares étaient ceux qui se présentaient à Ellen et lui parlaient de couleurs. Ils se contentaient en général de prendre leur arme, demandée anonyme et basique pour éviter les dettes et embarquaient l'aboutissement de son travail sans un mot. Certains partaient en lui laissant un papier pour la "reconnaissance de dettes", apparemment c'était chose fréquente dans le monde d'En-Haut que d'avoir recours à de tels procédés. Procédés grotesques à Underland, où un papier brûle si aisément.
Mais bon. Tels étaient les goûts des gens, et Ellen n'y pouvaient rien.
Ainsi, lorsque Julia s'était présentée à elle, la jeune femme l'avait d'abord prise pour une condamnée comme une autre. Ses yeux s'étaient éclairés quand elle avait découvert que sa nouvelle cliente était pâtissière ▬ fait non négligeable ▬ et elle avait jubilé en découvrant qu'elle n'était pas indifférente aux charmes des feux d'artifices.
Elle avait passé deux semaines entières à monter ses feux, redécouvrir le plaisir de travailler la poudre, les assemblages. Cela faisait si longtemps qu'elle n'avait pu en tirer pour un autre qu'elle-même ▬ et en catimini. Elle voulait que le spectacle soit grandiose. Et, ce matin-là, elle avait appelé Julia, la conviant aimablement à la rejoindre à l'extinction des feux.
Il était temps pour Underland de revêtir ses habits de lumière.

Pour l'occasion, la rouquine avait choisi que son art prendrait place au-dessus des eaux. Le lac reflétait magnifiquement les couleurs vives, et les feux étaient lancés avec asse de hauteur pour ne pas éclairer ce qui se trouvait en ses bas-fonds. Alors que l'heure du couvre-feu approchait, Ellen peaufinait les dernières préparations. Elle finissait d'installer les dispositifs de tirs, de trier les feux, les positionner selon leur angle de tir. Elle jeta un rapide coup d’œil sur sa montre ; Julia ne devrait pas tarder.

« Que la lumière soit. »